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Alice and the Fawn in the Forest of no-Names

texte de 2001

Alice and the Fawn in the Forest of no-Names

Faut il et peut on changer le nom, la loi sur le nom, en particulier le nom des femmes et de (leurs) enfants ?

Oui, selon notre conception du nom et de son rôle par rapport aux individu-es.

Le nom est double : cette caractéristique donne une idée synthétique à la fois :

- des raisons et de la possibilité de le changer,

- et des difficultés et obstacles que peuvent rencontrer celles qui veulent le faire.

- « νομος, ονομος Nomos, Onomos » :

Le nom est la première des libertés, le premier des droits, car il est le point d’attache des droits : pour avoir des droits, il faut pouvoir être identifié comme titulaire des droits, c’est à dire avoir un nom.

Une personne sans nom, pouvant être confondue avec une autre, ne peut avoir de droits : une personne sans nom propre, ne peut avoir de droits propres.

D’où le rapprochement en grec : « Nomos » signifie Nom, « Onomos » signifie « Loi » : la loi est la où est le nom.

- « Dear Me ! » dit le faon, petit du cerf (Deer en anglais) de Lewis Caroll :

Le nom est la première des prisons, la première des lois qui s’imposent à l’individu, car il est le lien avec une « identité », un rôle, une place sociale à laquelle il assigne la personne, la représentation d’une essence qui prive l’individu de sa liberté de (ne pas) se définir, de (ne pas) se nommer, d’exister (au sens de ce mot dans l’existentialisme) sans s’aliéner en se laissant enfermer par une essence, un destin (Nomen, Omen…) quelconque.

Le nom est l’opposé du « je-rien » : en hébreu « Ani-Ayin » : « les trois lettres qui écrivent le mot Ani, je, aleph-noun-yod, écrivent aussi le mot Ayin, aleph-yod-noun, qui signifie le néant »[1]

Ces deux aspects du nom montrent bien quel est le sens de la question du nom.

Liberté de se nommer (ou non), la liberté de ne pas être nommée, définie, par d’autres, droit au nom (ou pas), c’est bien de savoir qui est le maître dont il s’agit : « Which is to be the master, that’s all ! ».

L’enjeu de la question du nom des femmes, de leur liberté de se nommer et de nommer leurs enfants, de leur droit d’avoir un nom propre, est bien une remise en cause de la domination masculine dans ce domaine et dans tous ce qui en dépend.

Contrairement à beaucoup des théoriciens du nom, nous ne voyons dans le lien entre le nom et l’ « identité » de la personne, aucune magie ni pouvoir naturel ou intrinsèque : nous n’y voyons rien que d’autre que le résultat de rapports de force sociaux, de circonstances « matérielles ».

Les rapports de force sociaux, les conditions matérielles, il est de notre responsabilité à toutes et tous de les rendre plus justes, sans reculer devant les menaces des conservateurs, qui voudraient nous faire croire que le monde va s’écrouler si l’on touche au « nom-du-père » et autres idoles verbeuses. Nous pouvons, nous DEVONS, le faire.

Changer les noms et les symboles ne change pas magiquement les choses : ceux qui ne proposent aux femmes des changements uniquement symboliques les bernent et nous n’en sommes pas dupes. Mais il est certain que tant que nous n’aurons même pas le pouvoir de changer les noms, les symboles, les concepts qui légitiment l’injustice, tant que les autres nous définirons ou nous effacerons à leur guise, nous n’aurons aucune chance de changer les choses !

Voici pourquoi nous vous invitons à une promenade dans la Foret de No-Name…

[1] (Marc Alain Ouaknin, Tsim Tsoum, Albin Michel 1992).

Madame, Mademoiselle

dimanche 3 février 2013

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