dimanche 3 février 2013

LA FORCE DE L'USAGE : OBSTACLES RENCONTRES PAR LES FEMMES QUI SOUHAITENT FAIRE RESPECTER LEURS DROITS



LA FORCE DE L'USAGE : OBSTACLES RENCONTRES PAR LES FEMMES QUI SOUHAITENT FAIRE RESPECTER LEURS DROITS


- L'ignorance du droit

Ignorance par les femmes :
La plupart des femmes pensent que l'appellation fait légalement partie de l'état civil et par conséquent, ne songent même pas à demander que l'on déroge à ce qu'elles croient être la loi. Elles pensent qu'elles ne peuvent pas refuser. Elles pensent que sans être mariées, elles n'ont pas "droit " au titre de madame.

Ignorance par les interlocut-eurs des femmes :
La plupart des gens (y compris parmi les membres de l'Administration, les officiers ministériels et autres juristes !) amenés à désigner une femme :
- croient qu'ils sont obligés de la désigner en fonction de sa situation de famille, et qu'elle a l'obligation de porter le titre "correspondant" à sa situation et n'a pas droit à un autre titre, se croient autorisés à l'appeler mle malgré son refus
- et par conséquent croient qu'ils sont obligés d'interroger la femme sur sa vie privée, autorisés non seulement à lui poser des questions relatives à sa sexualité et sa famille mais à lui demander la preuve, la justification de sa réponse " madame : alors vous êtes mariée, divorcée…pourquoi n'avez vous pas d'alliance ?…", et croient qu'elle a l'obligation non de répondre à leurs questions. 

- La reconnaissance de la "coutume" contra legem (contraire à la loi)

Pour certains juristes praticiens (il n'y a pas de jurisprudence), le fait que l'usage ne repose sur la loi, et soit en contradiction avec des droits reconnus par la loi, n'empêcherait pas la coutume de s'imposer, d'acquérir force de loi…

Cette réaction est en opposition radicale avec les principes de base du droit français, fondé sur le principe de légalité.
La reconnaissance par la jurisprudence d'une coutume contra legem est rarissime en droit français. Le seul cas reconnu actuellement concernant les "dons manuels", c'est à dire les biens, il s'agit d'éviter d'imposer la formalisme lourd d'un acte notarié pour des dons de valeur relativement faible et d'une sorte d'"amnistie" permanente de droit de succession pour des montants peu élevés. La coutume ainsi reconnue est donc un "droit plus doux" que la règle légale.
Par contre, à notre connaissance aucune coutume contra legem en matière de droit des personnes n'a été reconnue… sauf, par le passé en ce qui concerne .»les nom des femmes mariées (voir thème suivant).

- Les inconvénients pour les tiers du respect du droit

Une entreprise pourra craindra que son employée, en portant une appellation non conforme à l'usage, ne donne de l'entreprise une image "marginale" "excentrique"…

- Les dangers de la revendication : la condamnation de la femme qui revendique

Compte tenu de l'ignorance générale du droit et du non respect général et généralement admis du droit, la célibataire qui demande a être appelée madame passe le plus souvent :
soit pour une fraudeuse ou une faussaire,
soit pour une escroque qui tente d'entraîner les autres dans l'illégalité,
soit pour une malpolie qui ignore les règles élémentaires de la vie en société,
soit pour une déséquilibrée qui n'accepte pas son identité,
soit pour une folle qui ne connaît la réalité de ses droits,
soit pour une folle qui ne sait pas qu'elle "doit" renoncer aux droits que l'usage lui refuse,
soit pour une impudente qui prétend à un honneur auquel elle n'a pas droit,
pour coupable d'atteinte au droit acquis des praticiens à la négligence du droit,
coupable de faire perdre du temps aux professionnels,
coupable par là d'un abus de droit …
pour une féminiiiiiiiiiiiiiste ! intégriste du politiquement correeeeeeeeect !

- Les dangers de la revendication : la punition de la femme qui revendique

La femme qui dérange ainsi la routine, ou qui apparaît comme une féministe risque d'être brimée par un supérieur macho (ou une supérieure miso..), ou de voir son dossier avec moins de bienveillance par une administration ou d'une banque ou d'un autre fournisseur…

- La peur du rire, sanction de la violation de la coutume, et le risque d'insister sur un aspect sexuel

Attention mot piégés : La femme qui parle de son appellation peut craindre de déclencher :
- Une agression verbale, sous prétexte qu'elle aura "parlé la première" d'un sujet ayant un rapport avec la sexualité…
- Le rire, sous prétexte du prétendu côté dérisoire de la demande, et à cause de la référence sexuelle.
 Le rire joue, ici comme dans d'autres domaines[1] , sa fonction de répression de la violation de la coutume.
- Enfin, elle risque d'être qualifiée d'"hystérique" (au sens sans doute où Freud l'entendait[2] !…)

 «Des féministes hystériques. : Ces féministes s’insèrent dans le courant du « politiquement correct ». Pour elles, tout le langage contribue à conforter le pouvoir patriarcal et à véhiculer de génération en génération la hiérarchie sexuelle dans la société. Alors, qu’on élimine les termes génériques comportant comportant « man ou men » ou toute allusion à la vie personnelle, exigent elles. Policeman devient Policeperson. On n’appelle plus une vieille fille Miss mais Ms. Une véritable épuration linguistique, on le voit, qui sévit dans certaines universités et dans une partie de la presse. »[3]

- Le coût en temps et en argent

Enfin, last but not least, le coût en temps et en argent des démarches qu'il faut faire pour obtenir des autres, de tous les autres (les impôts, la poste, les caisses de maladie et de retraite, la poste, l'assurance, l'employeur, l'employeur du mari, les fournisseurs, l'école, les fichiers publicitaires…etc, etc) qu'ils utilisent l'appellation que vous avez choisie, est vraiment dissuasif !


[1] Nous publierons dans un prochain numéro un article sur la fonction du rire
[2] cf le cas de Dora dans "Cinq Psychanalyses" PUF 1954 (Nous publierons dans un prochain numéro une étude sur l'agression)
[3] Béatrice Majnoni d’Intignano Femmes si vous saviez... Ed de Fallois 1996

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire